« Qu’est-ce qui empêche que je sois baptisé ? » Cette question de l’eunuque résonne cruellement après l’allocution du Premier ministre mardi. Les célébrations et rassemblements sont toujours impossibles jusqu’en juin.
Je pense à la catéchumène que j’accompagne. Comme l’eunuque avec Philippe, nous avons échangé autour de la Bonne Nouvelle, creusant toujours davantage le désir de devenir chrétien. Et aujourd’hui, le désir déçu risque de devenir amertume. Ce texte des Actes des apôtres brasse les interdits, autant d’actions qui percutent un corps confiné : voyager, rencontrer de nouvelles personnes, s’asseoir à côté d’elles, jusqu’à partager le pain offert. Comment rester vivant sans ce pain de vie reçu ensemble ?
Aussi, je peux vivre cette rencontre de Philippe et l’eunuque comme uniquement privation. Mais j’oublierai ces locutions qui sonnent à mes oreilles comme « l’ange du Seigneur adressa la parole à Philippe ». La parole de Dieu précède l’agir de l’homme. Dieu a toujours un coup d’avance ; Il est source et fin du désir. « Personne ne peut venir à moi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire ». Notre eunuque revient de Jérusalem. Il y était parti pour adorer. Sans comprendre les écritures ni être baptisé, l’eunuque adorait. L’adoration précède et dépasse la compréhension.
Dieu dispose le cœur de l’eunuque qui se met en route même s’il lui manque des clefs pour comprendre. Il adore ce Dieu parce que c’est le Dieu qui est, le Dieu de la présence, et non parce qu’il le comprend. Ce texte invite au dépassement de l’action pour redécouvrir celui qui ne peut être que déjà là, que présence. Aussi, cette inaction forcée et l’ajournement des retrouvailles sont des fêlures où le quotidien se réajuste : Dieu d’abord présent, l’action ensuite. Où puis-je adorer Dieu dans mon périmètre réduit ? Quelles peuvent être les occasions de le reconnaitre comme premier et le louer ? Qu’est-ce qui m’empêche d’adorer Dieu aujourd’hui? Qu’à chaque geste du quotidien si simple soit-il, je puisse rejoindre Dieu et lui dire : « Et ici aussi, tu étais présent ? ».
Elise C.